Consultant, Docteur et Enseignant spécialisé en droit de la commande publique depuis 2019, John Eric DICKA vient de clôturer plusieurs années de recherches et d’analyse en droit des contrats publics, et est diplômé d’un doctorat PhD en droit public de l’université Paris Saclay (1 ère université européenne du Classement Shangaï) où il vient de soutenir sa thèse.
Ses travaux de recherches ont porté sur Contribution à l’amélioration du cadre juridique du processus de passation des marchés publics au Cameroun. Mme Laurence Filliot-Lalliot, professeur de droit public à l’université de Paris Nanterre, experte reconnue du droit de la commande publique a siègé dans le jury.
John Eric DICKA est aussi Président de l’Association Pour la Promotion de la Commande Publique en Afrique et Directeur de publication de la Revue Africaine de Droit des Contrats Publics (RADCP).
Il a accordé une interview à la CCRP de l’ARCOP
Quelle est la problématique abordée ?
La problématique est tournée vers l’appréhension scientifique de la politisation et l’instrumentalisation de la commande publique – ici, du processus de passation des marchés publics –. En d’autres termes, questionner comment les pouvoirs publics utilisent le processus de passation comme un moyen leur permettant d’atteindre de nombreux objectifs, enjeux et finalités (et non plus seulement la satisfaction de leurs besoins propres).
L’étude tente de la révéler et de l’approfondir, en se basant sur l’échantillon du Cameroun et en se servant de plusieurs méthodes : la méthode d’interprétation téléologique (déjà employée par le juge européen des droits de l’homme dans l’arrêt Golder du 21 février 1975) ; l’analyse économique du droit qui rappelle la profonde filiation entre le droit de la commande publique et les problématiques de développement, dont l’essor économique ; l’analyse comparative qui nous a permis de faire un large travail de comparaison avec plusieurs autres systèmes (La France, le Cameroun, le Sénégal, le Gabon, le Québec, le Maroc, etc.) ; l’analyse des politiques publiques (pour révéler comment le nouveau management public a modernisé l’action publique dans ce sens) et même l’analyse philosophique (pour saisir les nombreuses valeurs qui chargent aujourd’hui les processus de passation à travers le monde).
Quel est l’apport de la thèse à la doctrine Africaine ?
Elle expérimente des méthodes nouvelles, dans un champ très souvent saisi de manière procédurale. Elle vise même à étendre l’analyse d’un sentier battu (la phase de passation). La combinaison de ces deux élans, permet d’apporter un autre regard axiologique et stratégique aux systèmes de passation, sous le prisme du droit – la plupart des études dans ce sens sont produites par des économistes, des statisticiens ou des gestionnaires –. Théoriquement, c’est un essai de conceptualisation des finalités et c’est donc une expérimentation d’orientations osées modestement et qui méritent que d’autres travaux puissent les approfondir. Sur la pratique, elle structure un ensemble de moyens techniques qui peuvent permettre aux pouvoirs publics de mieux cerner leur vision et de se projeter dans un management des contrats plus ambitieux et performant.
Quel est votre opinion sur la pratique de la régulation au Sénégal ?
La pratique sénégalaise de la régulation s’inscrit dans une action indépendante d’accompagnement – stratégie, formation, audit, et définition des politiques pour conduire les parties prenantes dans le respect de la réglementation – et de gestion contentieuse intéressante (l’institution d’un CRD au sein de l’ARCOP pour agir dans un pan non juridictionnel). L’institution qui l’incarne, a d’ailleurs la possibilité d’agir dans les principaux secteurs de la commande publique (PPP et marchés).
À cet effet, la régulation sénégalaise se présente comme riche d’autant plus qu’elle se démarque de plusieurs pays d’Afrique. Toutefois, l’action gagnerait encore à être conforter dans la préservation de l’ordre publique économique (mission principale d’une régulation qui s’inscrit dans la préservation de l’équilibre concurrentiel) sur un secteur comme la commande publique qui se présente en tant que paradigme de rencontre entre l’offre et la demande. Ceci serait un plus notamment pour la sécurisation du marché et des investissements ; gages d’un système qui se veut performant.