Les besoins en infrastructures sont considérables à travers tous les continents. En Afrique, la Banque africaine de Développement, en fin 2023, estimait qu’entre 130 et 170 milliards de dollars US sont nécessaires au développement des infrastructures chaque année, ce qui laisse un déficit d’environs 100 milliards de dollars US. En effet, un effort soutenu d’investissement est nécessaire dans les secteurs dits traditionnels pour entretenir ou réhabiliter l’existant, mais aussi pour promouvoir de nouveaux projets, créateurs de valeur.
Dans la même veine, les déficits budgétaires accrus des États corrélés à l’évolution de la dette publique amenuisent les ressources publiques disponibles pour des investissements à long terme. La crise économique a recentré les priorités des États autour de stratégies conjoncturelles. Pour combler le gap de financement en infrastructures, il est indispensable de faire appel aux financements innovants provenant du secteur privé mais aussi de l’épargne et des transferts d’argent, en particulier du côté des sociétés d’assurances, caisses d’épargne, banques, Caisses des dépôts et consignations, qui gèrent, à l’échelle mondiale plus de 100 000 milliards de dollars, dont seule une part congrue est aujourd’hui allouée aux actifs réels dans l’infrastructure. Pour les transferts, au Sénégal, Les migrants envoient environ 2 milliards de F CFA par jour, flux financiers dont une part pourrait être orientée vers des domaines ayant un meilleur impact socio-économique sur les communautés, notamment l’investissement dans des infrastructures marchandes.
Les partenariats public-privé associés aux projets d’infrastructure génèrent des cashflows récurrents et sont bien adaptés pour recevoir cette manne financière sous forme d’investissements. Différentes études montrent que les revenus liés à ces placements sont résilients aux chocs économiques ou monétaires et permettent ainsi de réduire au maximum le risque lié au retour sur investissement.
Il est clair que l’infrastructure, en PPP, est une forme d’investissement au profil risque/ rendement se situant entre les actions(risquées) et les obligations d’État(quasi non risquées) . Elle devient une classe d’actifs innovante, à part entière, comme l’illustre la croissance rapide des fonds spécialisés pour l’investissement en capital et depuis quelques décennies, en dette aux cotés des banques.
Un vaste écosystème très complet d’acteurs s’est créé dans le monde : ingénieristes, constructeurs, exploitants et mainteneurs, opérateurs, cabinets juridiques, cabinets de conseil, banques de financement et d’investissement, fonds d’investissement, … Cet atout permet de constituer des consortiums prêts à développer les types de projets du genre PPP, qui nécessitent la maîtrise et la combinaison de nombreux savoir-faire.
En effet, pour rapprocher les besoins considérables en financement d’infrastructures développés plus haut et la recherche d’opportunités des investisseurs, il faut préparer et structurer de bons projets pour les rendre « bancables » (dette bancaire) ou « investissables» (fonds propres d’actionnaires), axés toutefois sur la réalisation des ODD. Pour ce faire, il faudra recourir aux technologies numériques vertes, prendre en compte l’autonomisation des femmes, et la participation des parties prenantes à toutes les étapes du cycle de vie des projets.
Ces montages peuvent se révéler très complexes et comportent de multiples dimensions : financière, juridique, comptable (privée et publique), fiscale, organisationnelle, technique d’analyse des risques, comportementale pour aligner les intérêts. La faculté de former des groupements, promue par le cadre juridique sénégalais dédié aux PPP doit trouver un écho favorable auprès des opérateurs économiques communautaires.
Les différentes définitions du partenariat public-privé donnent corps au principe qui les gouverne de façon générale : il s’agit d’un contrat écrit, établi entre une personne morale de droit public et un opérateur privé dans le but de réaliser des services ou ouvrages pour le compte des collectivités publiques, avec une logique d’identification, de mitigation et de partage des risques.
Le Sénégal, à l’image de nombreux pays au Sud du Sahara, est un pays en voie de développement qui a plusieurs secteurs en construction notamment celui des infrastructures. Ce dernier se heurte à des difficultés comme la rareté des ressources qui a pour conséquence le report de la réalisation d’infrastructures cruciales pour accompagner le développement ainsi recherché.
En effet, le secteur de la construction est ici classé parmi les moteurs de croissance de l’économie sénégalaise. La création de mesures incitatives en vue de réaliser des gains en efficience et de garantir que le public et les usagers en tirent profit, dépend de la qualité de la conception et la gestion efficace des projets sur toute leur durée.
Le Plan d’Action Prioritaire PAP3 (2024-2028) faisait ressortir un besoin de financement global de 27 182 Mds FCFA dont 46,6 % attendus du privé.
Le partenariat public-privé devrait fournir 4 608 Mds de FCFA du financement attendu. Il constitue un schéma contractuel peu connu des acteurs au Sénégal. Cette méconnaissance minimise son importance cruciale dans la conduite du développement socio-économique par la réalisation d’ouvrages et de services de pointe.
L’outil PPP, au Sénégal, est un des schémas contractuels de la Commande publique, à côté d’autres non moins importants comme les marchés publics.
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Depuis 2021, une nouvelle loi est adoptée pour corriger les imperfections notées en 17 (dix-sept) années d’expérimentation de cadre législatif et règlementaire sur les PPP, en rationalisant davantage le cadre juridique.
Avec la réforme de 2021, le législateur a opéré une rationalisation aussi bien dans le cadre juridique et organique, que matériel. Du point de vue de la règlementation tous les PPP sont, désormais, regroupés en deux catégories. D’une part, les PPP à paiement public hérités des contrats de partenariat et d’autre part ceux à paiement par les usagers hérités des délégations de service public.
Le PPP est une des variantes du financement de projet (Project financing) et sa mise en œuvre suit l’ensemble des principes applicables à cette famille de financement d’actifs qui se caractérise par une communauté d’intérêts des différents acteurs et l’utilisation de leviers financiers importants :
- Intérêts convergents des différents acteurs à faire le projet ;
- Éclatement des risques entre les différentes parties ;
- Forte proportion de dette dans le financement : levier d’environ (80%-20%).
Le cadre juridique dédié aux PPP au Sénégal consacre l’obligation pour les opérateurs économiques attributaires de contrat PPP de mettre en place une société de projet dédiée spécifiquement à la mise en œuvre des activités du projet. Ce mode de financement est appelé Project financing par opposition au financement corporate classique.
Le Project financing est une forme de montage contractuel et financier permettant de financer des ouvrages et des services en PPP. Ceux-ci doivent être autonomes par rapport aux entités publiques et privées qui les ont décidés et/ou développés. Les sources de financements constituent, pour l’essentiel, la dette. Le remboursement des fonds prêtés s’effectue, en effet, quasi-uniquement sur la base des flux de trésorerie du projet ou des loyers versés quand il s’agit d’un paiement public. Les banques ou autres prêteurs assument, en théorie, le risque sur les recettes du projet et ne peuvent recourir aux entreprises développant le projet que dans des cas limités.
Ces montages ne sont donc pas utilisés pour le financement des projets réalisés au sein d’une entreprise classique, mais pour des opérations spécifiques, identifiées et comptabilisées dans des structures juridiques ad hoc, appelées Société de projet ou SPV[1], qui s’éteignent à la fin du contrat PPP, en principe.
Plus de $ 300 milliards sont investis chaque année, au niveau mondial, par des banques et autres prêteurs ou bien par les marchés financiers sur de nombreux projets financés par la méthode du Project financing. Cette méthode consiste à financer des actifs, non sur la qualité du crédit ou des garanties bilantielles ou hypothécaires apportées par les actionnaires de la société qui réalise le projet, mais sur la trésorerie dégagée par celui-ci, sans recours ou avec un recours limité envers les actionnaires. En 1994, cette méthode de financement atteignait à peine 20 milliards d’euros. Depuis, ce montant est en nette augmentation.
Cette technique de montage draine non seulement des capitaux de plus en plus importants, mais s’est également répandue dans le monde entier où elle est utilisée dans de nombreux domaines d’activités. En outre, elle fait appel à de puissants leviers techniques et financiers sur des marchés de capitaux en pleine expansion.
[1] Single Purpurse vehicle